Alors que la communauté internationale s’enlise dans l’impuissance normative, les conflits s’intensifient, les frontières se dissolvent dans les convulsions armées, et les États, déliés de toute contrainte juridique effective, imposent leur volonté par la force brute. Le 18 avril 2025, les bombardements au Yémen, les frappes sur Gaza et la violence militaire en Ukraine ont offert un tableau accablant de l’ère géopolitique contemporaine : une époque où le droit se tait, et où le feu parle.
Dans cet environnement mondial de déséquilibre, la Mauritanie n’a plus le luxe de rester passive. Si notre pays veut préserver sa souveraineté, son intégrité territoriale et la paix sociale chèrement acquise, il est impérieux de refonder notre approche sécuritaire. Cette refondation commence, à notre sens, par l’institutionnalisation d’un enrôlement volontaire et structurant de notre jeunesse, hommes et femmes, dans le cadre d’une doctrine nationale de défense intelligente, technologique et inclusive.
I. Les dynamiques régionales : un foyer d’instabilité à notre seuil
La Mauritanie est cernée par des foyers d’instabilité à plusieurs niveaux :
• Au sud-est, la zone sahélienne (Mali, Burkina Faso, Niger) est devenue le théâtre d’une guerre asymétrique prolongée où les États peinent à contenir les groupes jihadistes. La logique de contagion n’est plus hypothétique.
• Au nord, la reconnaissance unilatérale par des puissances majeures (États-Unis, France, Israël…) de la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental bouleverse les équilibres historiques. Le conflit latent entre Alger et Rabat devient plus structurel, plus menaçant. La position de la Mauritanie, à la fois géographique et diplomatique, devient alors particulièrement sensible.
• À l’international, les puissances modèlent désormais les rapports de force par des actions militaires directes (Ukraine, Palestine, Yémen…), traduisant l’échec du droit onusien, et renforçant une architecture mondiale où seuls les États préparés survivent.
II. Vers une mobilisation nationale proactive : pourquoi et comment ?
La mobilisation de la jeunesse ne saurait se limiter à une vision archaïque de la conscription militaire. Il s’agit de penser un enrôlement volontaire, modernisé, valorisant, et productif, qui soit un levier à la fois de sécurité et de développement.
Les objectifs stratégiques :
• Créer une réserve opérationnelle qualifiée, prête à être mobilisée en cas de crise.
• Anticiper les menaces hybrides (cybersécurité, guerre de l’information, drones…).
• Réinsérer les jeunes dans une dynamique de citoyenneté active et de valorisation des compétences.
Les leviers incitatifs à mettre en œuvre :
- Valorisation sociale et professionnelle :
• Préférence dans les concours de la fonction publique.
• Accès facilité à l’entrepreneuriat post-service (microcrédit, incubateurs…).
• Titres honorifiques nationaux ou diplômes techniques reconnus.
- Insertion directe dans le marché du travail :
• Emplois publics réservés aux enrôlés.
• Partenariats avec des entreprises nationales et internationales pour l’embauche prioritaire.
- Formation technique de haut niveau :
• Spécialisation en technologies militaires modernes : surveillance par drone, détection par radar, cybersécurité, télécommunications tactiques.
• Certification internationale des compétences acquises.
- Soutien matériel et symbolique :
• Rémunération motivante, couverture sanitaire, logement militaire temporaire.
• Inscription du service dans un parcours de mérite patriotique.
III. La participation des femmes : une nécessité contemporaine, un héritage islamique
La guerre moderne se mène depuis des salles de contrôle, des interfaces numériques, et des centres de commandement automatisés. Elle exige de la précision, de la rigueur intellectuelle, des compétences analytiques et technologiques. Aucune de ces qualités n’est genrée.
Il est donc absurde de continuer à exclure nos jeunes femmes de la défense nationale, surtout que :
• Le cadre logistique, médical, cybernétique, et de renseignement militaire peut parfaitement être occupé par des femmes, sans enfreindre nos valeurs.
• Des précédents historiques dans la tradition islamique, comme Nusaybah bint Ka’b ou Umm Sulaym, témoignent d’une présence féminine engagée, noble, et respectée dans les premières batailles de l’islam.
Un encadrement spécifique – respect des normes religieuses, séparation des unités, code éthique – permettrait à la femme mauritanienne de défendre son pays sans perdre son identité.
IV. Ce projet dans le cadre d’un dialogue national
Ce plaidoyer ne se veut pas un document isolé, mais le prélude à une série de propositions que nous ambitionnons de soumettre dans le cadre du dialogue national attendu.
Se préparer ou se soumettre
L’Histoire ne pardonne pas l’imprévoyance. Dans un monde où la paix ne s’offre plus mais se construit, l’enrôlement volontaire de notre jeunesse est à la fois une nécessité stratégique, un acte d’amour pour la patrie, et un mécanisme moderne d’émancipation collective.
La Mauritanie n’a pas vocation à être un simple spectateur de la tragédie géopolitique mondiale. Elle doit devenir un acteur lucide, armé d’une jeunesse préparée, fière, et volontaire.
✍️ L’Ingénieur El Hadj SIDI BRAHIM SIDI YAHYA
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